
Il est impossible de trouver 2 personnes ayant la même relation avec un manga. Et cet écart est encore plus visible lorsque l’on parle de l’incipit d’un manga. Chacun va le vivre différemment. Certaines personnes préfèrent des incipit bien plus lents et qui prennent le temps de développer les personnages et leur univers avant de réellement plonger dans l’action tandis que d’autres préfèrent des incipit in medias res, qui vont très vite et qui expliquent le tout. Personnellement je ne suis friand ni de l’un ni de l’autre, mais aujourd’hui, je vais vous parler d’un manga ayant parfaitement réussi à allier les 2 pans du monde de l’incipit. Laissez-moi vous parler du tome 1 de Oshi no Ko.
Bien évidemment je vais limiter au maximum les spoilers, en survolant rapidement le scénario de cet tome 1 en me limitant au synopsis disponible sur des sites tels Nautiljon, qui spoilent le chapitre 1.
De très bonnes bases, avant même le chapitre 1

Ce n’était pas quelque chose que je faisais énormément lors de la saison 1, mais je vais essayer de légèrement vous narrer l’histoire autour du manga que je traite, tout en vous présentant les auteurs.
Oshi no Ko est donc un manga scénarisé par Aka Akasaka et écrit par Yokoyari Mengo. Ces noms vous disent quelque chose ? C’est normal !
Aka Akasaka est le mangaka derrière Kaguya-Sama : Love is War, excellente romcom adaptée en anime début 2019, qui a eu droit à une saison 2 début 2020, et qui paraîtra chez Pika Edition le 17 mars avec la sortie simultanée de ses deux premiers volumes. C’est un auteur qui excelle dans la mise en scène, dans la construction d’un scénario, dans le développement de personnages et dans la création de situations comiques. Oshi no Ko allait représenter un nouveau défi pour lui : créer un récit bien plus sombre, traitant de thématiques propres uniquement au monde d’aujourd’hui et au traitement de l’esprit humain par rapport aux flux d’informations qu’il peut trouver sur Internet, qui sont de plus en plus grands au fur et à mesure que le temps avance sa marche inexorable et que le monde du virtuel poursuit son inévitable ascension.


De son côté, Yokoyari Mengo est une dessinatrice connue pour des seinens au côté ecchi et même par moment du hentai. Sans compter Oshi no Ko, elle est derrière 8 mangas, tous assez courts. Son plus gros succès à l’heure actuelle est Kuzu no Honkai, seinen traitant du thème de l’adultère, adapté en anime courant 2017 et en drama la même année. A ma connaissance, un seul de ses titres est actuellement sorti en France, à savoir No Control!, œuvre en 2 volumes disponibles chez Tonkam (qui l’ont indiqué comme scénariste, du génie). Il s’agit donc d’une mangaka assez méconnue en France, mais qui possède une certaine expérience. Oshi no Ko allait également être un défi pour elle. Elle devrait sortir de sa zone de confort, qui va du seinen ecchi au hentai, en synthétisant son dessin pour proposer un style qui collerait au mieux au scénario d’Akasaka, qui était lui-même bien plus profond et sérieux que Kaguya-Sama.
Une dessinatrice qui avait enchaîné énormément de séries courtes alliée à un scénariste auteur de l’un des seinen les plus vendus de ces dernières années. Oshi no Ko semblait destiné à être un classique de son genre avant même le début de sa parution au vu des mangakas à l’origine du projet. Mais on l’a vu avec Samurai 8, avoi été crée par un auteur reconnu pour une oeuvre culte ne suffit pas à faire de toi une oeuvre culte. Et c’est ce qu’allait devoir prouver Oshi no Ko.
Réussir à innover sur une formule bien en place

C’est… Dur, d’innover sur un incipit. C’est très dur, car il existe des schémas narratifs qui font très bien le travail, alors pourquoi se priver ? Oshi no Ko innove certes sur la forme de son incipit, mais le fond reste globalement assez classique, bien que se permettant certaines folies, en allant piocher dans plusieurs genres. Romance, Gag-manga et même… Isekai (oui), l’incpit d’Oshi no Ko ressemble à une synthèse de ce qui marche, en apportant certes sa propre touche, qu’on pourrait décrire en deux termes : monde du show-biz et justesse d’esprit. Et histoire d’avancer, je vais être obligé de parler du scénario d’Oshi no Ko, car juger un incipit sans parler de ce qu’il raconte, ça serait pas très pertinent.
Oshi no Ko nous raconte donc l’histoire de Goro, médecin travaillant dans un hôpital de campagne qui est complètement fan de l’idole Ai. Cependant un jour, cette même Ai arrive dans son hôpital, enceinte de jumeaux, et demande à Goro de l’aider à accoucher. Tout se passe bien jusqu’au jour de l’accouchement, où Goro se fait assassiner par une mystérieuse personne. Cependant il se retrouve réincarné en l’un des 2 jumeaux d’Ai. Il n’est plus Goro, il est désormais Aquamarine Hoshino, et va chercher à retrouver son assassin.
Synopsis/résumé du chapitre 1 de Oshi no Ko
Voilà comment on pourrait résumer le synopsis du tome 1 de Oshi no Ko.Les autres chapitres du tome développeront par la suite plusieurs domaines, avec en tête d’affiche 2 personnages : Ruby Hoshino, soeur d’Aqua et bien évidemment Ai Hoshino, leur mère. Les chapitres suivront d’ailleurs tous le même schéma narratif :

Ils commencent tous par un flashforward où on voit un personnage dans une scène de la vie de tout les jours (interview/taches ménagères…). Pour rappel, un flashforward est l’inverse d’un flashback. Là où un flashback nous ramène dans le passé en nous présentant le passé d’un personnage, un flashforward nous emmène dans le futur. C’est d’ailleurs parfaitement expliqué par les noms de ces procédés narratifs. « Flashback » peut être traduit par « retour en arrière » là où « flashforward » peut être traduit par « bond en avant ». Il faut aussi noter que le flashforward est un procédé narratif bien moins utilisé que son équivalent. La raison est assez simple et demeure dans leur but : là où le flashback approfondit un personnage, le flashforward suscite de l’attente chez le lecteur/spectateur, en nous montrant un personnage grandit et qui a des expériences qui nous sont inconnues. C’est d’autant plus vrai dans l’industrie du divertissement, où la survie d’une oeuvre ne peut être garantie que par de bonnes ventes et une certaine rentabilité, sous peine d’un arrêt prématuré. Et là Akasaka case sans problème 8 flashforward dès son tome 1, sans se soucier d’une potentielle annulation… Chapeau !
Dans le cas d’Oshi no Ko, ces flashforward sont même très intéressants puisque Akasaka fait soit mention d’évènements plus que majeurs qui ne se sont naturellement pas déroulés dans le tome 1 ou alors d’évènements se déroulant parfois dans le chapitre en question. Par exemple, le flashforward du chapitre 4 est constitué d’une interview d’un fan d’idole qui parle d’un événement…. Qui se déroule dans le chapitre 4. J’ai bien d’autres exemples mais je ne vous en parlerais pas afin de ne pas vous spoiler !
Une œuvre au potentiel monstrueux

Mais ce qui brille énormément avec Oshi no Ko, c’est clairement son énorme potentiel, sur absolument tout les plans. Le scénario reste clairement le gros point faible de ce tome 1, qui se concentre sur l’exposition et le début de la construction de l’univers d’Oshi no Ko, univers qui est à l’inverse le gros point fort du manga. On se sent réellement happé par cette description macabre, mais terriblement juste du monde du show-biz qu’Akasaka et Mengo nous narrent. Mais la lenteur du scénario sur ce tome 1 est justifiée par les très très nombreuses pistes qu’il laisse au sujet de futurs arcs narratifs. En voilà quelques-uns, qui sont clairement les pistes les plus évidentes :
- Ruby est-elle réincarnée ?
- Qui a tué Aqua ?
- Qui est le père des jumeaux ?
- Aqua doit-il abandonner sa vie en tant que Goro ?
J’ai été d’ailleurs très surpris de voir le manga citer des sociétés comme « Oricon », « YouTube » ou « Tik Tok », là où je pensais que ces sociétés voyaient leurs noms transformés dans des oeuvres telles que celle-ci pour problème de droits d’auteurs. Surprenant, bien que ça aide encore plus à l’immersion.

Chacun des personnages est aussi très passionnant et joue avec cette idée de « double facette » : celle qu’on montre à la société, et par extension au public dans le cas d’une célébrité, et notre véritable personnalité, que seul nous connaissons et qui doit faire face à notre conscience. Cette idée s’applique aussi à l’un des thèmes majeurs d’Oshi no Ko, que j’illustrerais avec une citation d’Ai :
Pour moi, le mensonge est une forme d’amour
Ai Hoshino, Oshi no Ko chapitre 9
Cette thématique sur l’amour s’emboîte parfaitement avec l’autre thème majeur d’Oshi no Ko, à savoir la présentation, l’analyse et la critique du monde actuel du show-biz, pour donner un tout absolument sublime et impressionnant. Impossible de savoir à ce stade jusqu’où Akasaka va aller dans l’analyse de ces thèmes…
Mais dans tout les cas les quelques thématiques liées à ça et au fait de jouer un rôle explorées dans le tome 1 sont très intéressantes et promettent énormément pour la suite. Et ça serait oublier le dessin de Yokoyari Mengo, qui sublime le tout en offrant un trait visuel très adulte au récit d’Akasaka. Son dessin synthétise parfaitement le scénario d’Akasaka, ils se complètent l’un-l ‘autre.
Catégorie | Note | Avis résumé |
---|---|---|
Personnages | 18/20 | D’excellentes bases pour la suite du manga, avec des arcs narratifs qui s’annoncent juste passionnants ! |
Scénario | 15/20 | Clairement le point faible de l’incipit, mais qui est magistralement sauvé par un certain twist inattendu. |
Ambiance et Univers | 19/20 | Le gros point fort du manga à l’heure actuelle, très très bien développé et qui a encore énormément de marge ! |
Dessin | 17/20 | C’est du Yokoyari Mengo, donc c’est du grand art ! On ressent tout particulièrement un travail au niveau des visages et des émotions ! |
Plaisir de lecture | 19,5/20 | La lecture passe toute seule, on est pris dedans et on en redemande ! |
Total | 88,5/100 = 17,7/20 | Une vraie pépite et un futur classique en devenir |
Oshi no Ko est un futur grand du monde du manga. Difficile d’imaginer la suite avec un incipit qui semble préparer énormément de chose en ouvrant pas mal de portes narratives. En tout cas ce qui est sûr, c’est qu’on a en face de nous une véritable pépite qu’il faudra surveiller à l’avenir. Pas de sortie française prévue à l’heure actuelle, mais au vu du succès que connaît la série au Japon et avec le fait que l’oeuvre d’Akasaka va bientôt arriver en France avec Kaguya-Sama, je reste vraiment optimiste sur l’arrivée d’Oshi no Ko dans nos contrées !
Merci à vous de m’avoir suivi pour ce premier article de la saison 2 ! J’espère que la nouvelle formule vous plaira ! Je vous dis à très bientôt pour la suite, les prochaines Lectures d’Amano vont surtout être dédiées à des lectures de fin d’année 2020 que je n’avais pas encore abordé !